Les boîtes à sceaux
Objet à tâtons, découvrons!
Qu’est-ce donc que cet objet? Un pendentif pour tenir tout contre soi une image de l’élu(e) de son cœur?
Non! Cet objet, pourtant de la même taille, est ce qu’on appelle une boîte à sceau. Ce type d’artéfact, relativement rare, est encore peu étudié. Les archéologues le classe dans la catégorie des instrumentum, autrement dit du « petit mobilier ».
De quoi est-il constitué?
Une boîte, un couvercle, des charnières et un décor sur le couvercle forment une boîte à sceau.
À quoi sert-il?
La boîte à sceau est utilisée pour protéger un cachet de cire qui scelle un document afin de garantir la confidentialité (et l’authenticité) d’un message. Elle est utilisée pour des messages rédigés à l’aide d’un stylet sur des tablettes de bois enduites de cire, mais pourrait également avoir servi à sécuriser des bourses, comme cela a été proposé pour des trouvailles à Kalkriese et Trèves (Allemagne).
Comment ça marche?
Une fois le document noué, le lien passe dans la boîte et est recouvert de cire liquide. Le sceau s’effectue en pressant une bague à intaille gravée ou avec un relief en métal sur la cire, laissant ainsi l’image représentée sur la bague! Au vu de la taille de la boîte (entre 2 et 3 centimètres seulement de longueur!), le chaton de la bague devait être assez petit pour pouvoir passer et presser la cire à l’intérieure.
Comme vous pouvez le voir sur l’image, le fond de la boîte présente trois petits trous permettant de laisser passer un peu de cire pour permettre probablement une meilleure adhésion de la boîte au support ou encore pour passer d’autres liens afin de fixer la boîte plus solidement au document.
Comment le sait-on?
Les archéologues peuvent identifier l’utilisation de ces objets grâce à l’étude de leur mode de fabrication ainsi qu’à quelques traces de cire à cacheter ou d’attaches parfois encore présentes à l’intérieur de ces boîtes (regardez bien les petites ouvertures sur les côtés des boîtes).
Petit +
Différents modes de scellement de documents existent à l’époque romaine. Des cachets en argile, dont la tradition remonte à bien plus loin en arrière, sont pratiqués pour sceller des documents, rédigés la plupart du temps sur papyrus ou sur parchemin. Au lieu de presser la bague à chaton dans de la cire, elle est pressée sur une pastille d’argile qui scelle un document. Sur le chaton, est représenté un motif qui peut être très varié. Il arrive que celui-ci soit décrit dans le document pour prouver que la lettre n’a pas été ouverte.
Quand et où?
L’utilisation de ces boîtes à sceau est constatée pour la période allant de la fin de l’époque républicaine à l’époque impériale (jusqu’aux environs du 3e siècle après J.-C.). Les premières boîtes sont faites en os ou en alliages cuivreux (bronze, etc…), mais le métal reste par la suite le matériau privilégié.
Ces artéfacts se retrouvent surtout dans les zones nord, nord-est et nord-ouest du monde romain. Une hypothèse avancée par Alex R. Furger, serait que l’utilisation de ce type d’objet soit liée au choix du support d’écriture selon la zone climatique. Ainsi, des cachets de cire seraient davantage utilisés dans les zones plus humides et froides, où on écrirait sur des tablettes enduites de cire, et des cachets d’argile dans les zones plus chaudes, où le papyrus est privilégié.
Et à Nyon?
La Colonia Iulia Equestris a révélé quatre boîtes à sceau en bronze découvertes lors de fouilles archéologiques effectuées dans différents secteurs de la ville. À l’exception d’un exemplaire, toutes sont entières (avec leur charnière permettant d’ouvrir la boîte) et relativement bien conservées. Sur certaines, un décor en émail est perceptible sur la face ornée du couvercle (face externe). La couleur verte de ces objets est due à l’oxydation du matériau face à son environnement. Il est en effet resté sous terre depuis presque deux mille ans!
La plus ancienne découverte date de 1907, au Prieuré de Nyon (Inv. MRN/621). La boîte en bronze et en émail est complète et peut s’ouvrir et se fermer. C’est un type que l’on appelle en forme de goutte et décorée d’un motif géométrique. Une autre boîte (Inv. MRN/12911-05) de même forme est découverte près des rives de Nyon, lors des fouilles de 2005 réalisées par Archeodunum à la Duche. Un phallus en érection sujet souvent interprété comme un symbole de fertilité, décore le couvercle. Ce type de représentation est parmi les plus fréquents qui figurent sur ces objets dans le monde romain. On le retrouve notamment à Augusta Raurica, où le plus grand corpus (138 boîtes à sceau romaines!) a été mis au jour.
Enfin, les fouilles de 1996 réalisées dans l’amphithéâtre de Nyon ont sorti de terre les deux autres boîtes à sceau connues pour la ville de Nyon à ce jour. Celles-ci sont de forme carrée contrairement aux deux autres exemplaires et semblent être plus tardives. L’une ne conserve que son fond (Inv. MRN/14106-172) et l’autre est entière et présente un décor géométrique de type floral (Inv. MRN/14106-174).
La fonction exacte de ces petites boîtes n’est encore pas très claire et les chercheurs ne sont pas tous d’accord sur l’interprétation de ces objets. Certains les identifient comme des objets exclusivement liés à la sphère militaire en raison de leur lieu de découverte, mais toutes ne proviennent pas de ce type de contexte archéologique. Des boîtes à sceau retrouvées dans des grands centres urbains, des temples ou encore en contexte funéraire suscitent de multiples interprétations et une étude plus large sur ce type d’objets pourrait peut-être nous en apprendre plus par la suite.